
© Raphaël Ferber/RTL 5minutes
Depuis l'été dernier, le bistro du Mudam est devenu "Pure", géré par un nouveau chef: Fabrizio Annicchiarico, qui tenait jusque-là le "OAK" à Luxembourg-ville.
Le "vagabond de la cuisine" s'est posé. Depuis quelques mois, Fabrizio Annicchiarico, qui se surnommait lui-même ainsi, est le chef du Pure, le nouveau restaurant vegan du Mudam. L'été dernier, il s'agissait encore d'un "pop-up". Mais le Pure s'est définitivement installé. Fabrizio y dirige une dizaine de personnes. Son but, que le bistro devienne "un choix logique pour les gens du Kirchberg" et "montrer que la cuisine végétale, ce n'est pas pour les lapins !" Il y propose surtout une cuisine 100% fait maison.
À vrai dire, cela fait quelques années que Fabrizio ne vagabondait plus vraiment. Le volubile quadragénaire gérait depuis 2017 le bistro OAK dans la rue Goethe, à Luxembourg-ville, où il a appris les rudiments du métier. Avec toujours cette volonté farouche d'exclure la viande de ses assiettes et de continuer à servir des plats végétaliens.
Le début d'année a été rude, il n'a pas été loin de jeter l'éponge, rincé par les conséquences de la pandémie. "Janvier a été le mois le plus dur de ma carrière" confie t-il. "On a survécu aux deux confinements sans le soutien des banques" lance t-il, avec fierté. "J'ai perdu deux équipes complètes. Heureusement que l'Etat était là."
Son arrivée au Mudam, il la doit à une rencontre inopinée. Un jour, "une dame avec des cheveux rouges est venue manger chez moi. On s'est fait des vannes, on a rigolé, je lui ai offert le café et elle a sorti sa carte de visite." Cette dame, c'était Bettina Steinbrügge, la directrice du Mudam. Deux mois plus tard, en juin cette année, Fabrizio fermait le OAK pour diriger la cuisine du bistro du musée, géré jusque-là en interne. "Recruter du personnel en pleine saison pour faire du végétalien sans gluten, j'avoue que ça n'a pas été simple non plus!"

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Ce jour-là, on nous a servi une "tortilla di verdure" 100% végétalienne avec des blettes d'Italie, cuisinée avec des pommes de terre, des légumes et des oignons rôties. Quant à l'"oeuf" nécessaire à l'élaboration de la tortilla, il est fait à base de farine de pois chiche, de noix de cajou, de salade, de curcuma et de sel sulfuré "récolté près des volcans". Accompagné du bowl de la semaine, notamment constitué de houmous aux truffes et au curry, de légumes et de champignons des bois, mais aussi de la soupe du jour rôtie au four, ce plat a précédé une part de gâteau cru abricot/chocolat: c'est donc le menu dégustation à 21 euros auquel nous avons eu droit.
N'étant ni végétalien, ni végétarien mais vaguement flexitarien, on doit dire qu'on a été très agréablement surpris par cette proposition, notamment par cette tortilla très goûteuse. Le tout pour un tarif très correct, qui devrait néanmoins légèrement augmenter "de 50 centimes car ça devient très difficile de maintenir ces tarifs, avec les augmentations du prix des produits et de l'électricité" souligne le chef. "C'est sûr, je n'ai pas choisi le chemin le plus simple" ajoute t-il. Mais de toute évidence, il en est fier. "Je ne fais pas ça pour m'enrichir et rouler en Maserati, sinon je ferai des scampis, de la mozzarella di Bufala ou du jambon de Parme."

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Fils de restaurateurs italiens, Fabrizio n'a suivi les traces de ses parents que depuis huit années. Avant, il avait plutôt la tête dans les chiffres.
Puis, il a quitté le secteur de l'immobilier et de la finance pour se lancer dans la gastronomie, "mais à ma manière" raconte t-il. Il a commencé à cuisiner au Luxembourg dans la rue, pour des bars: "j'ai vendu des gnocchis aux truffes à 5 euros la portion pendant un moment."
Si la Food Porn Company, spécialisée dans la street food, soit la nourriture de rue, vous dit quelque chose, sachez qu'il était derrière le concept. Avec son camion, il a écumé les festivals, proposant déjà des plats chauds végétariens. "Et puis, les food trucks se sont multipliés, tirant de plus en plus les prix vers le bas. J'ai préféré arrêter" explique t-il. Il est ensuite devenu traiteur végan et proposait notamment un service de cuisine à domicile.
Aujourd'hui, si les plats proposés au Pure ont pour la plupart été élaborés par Fabrizio, celui-ci avoue avoir pris du recul avec la cuisine. "Je gère l'équipe, j'imagine toujours des recettes, j'écoute la clientèle, bref je mets de l'huile dans la machine quand il le faut!"
Depuis ses débuts dans la gastronomie, le chef combine sa cuisine avec une démarche éco-responsable. Au OAK, sur les 8.000 plats qu'il y servait annuellement, "on peut considérer qu'on a évité de consommer 25 tonnes de CO2, plus de 11 millions de litres d'eau et 2.300 animaux ne sont pas nés pour alimenter l'industrie de la viande" énumère t-il, sûr de ses calculs. Au Musée, il mise sur 35 à 40.000 plats servis par an. Avec une nouvelle envie, celle d'organiser des brunchs d'ici peu.