Dans une interview exclusive, le Premier ministre luxembourgeois est revenu sur quatre années d'une législature pour le moins compliquée. Il évoque les problèmes rencontrés, les perspectives pour l'avenir et révèle ce qu'il considère être le secret du succès du modèle social luxembourgeois.

Il y a un peu plus de 4 ans, Xavier Bettel était réélu à la tête du gouvernement luxembourgeois. Une victoire qui est intervenue à peine cinq mois après les inondations historiques qui avaient ravagé le Mullerthal. On ne s'en doutait pas à l'époque mais le pire était encore à venir.

En effet, moins d'un an plus tard, les communes de Bascharage et de Pétange étaient touchées par une tornade comme on n'en avait jamais vu au Grand-Duché. De quoi remettre la crise climatique au premier plan de l'échiquier politique. S'en sont suivies des manifestations sans précédent dans les rues de la capitale luxembourgeoise.

Puis vint la pandémie de coronavirus. Une crise sans précédent qui a mis le monde à l'arrêt. Le Luxembourg n'a pas fait exception. Et alors que l'économie se relevait à peine des mois de confinement et de fermetures, une guerre a éclaté en Ukraine, aux portes de l'Europe. Un parcours sur lequel le Premier ministre a accepté de revenir avec nous.

"J'aurais préféré ne pas avoir de crise et faire autre chose", lâche-t-il d'emblée. "5,5 milliards ont été mobilisés pour la pandémie, pour la guerre et surtout pour aider les ménages au quotidien (...) on aurait pu faire beaucoup d'autres choses avec de tels moyens", ajoute-t-il.

C'est d'ailleurs son seul regret alors qu'il entame un virage décisif dans sa carrière politique. "Il y a la réforme fiscale que j'aurais aimé mener à terme mais je ne peux pas la financer", nous confirme-t-il à quelques mois des élections législatives. Le barème fiscal unique promis en 2019 devra donc attendre.

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© Arnaud Serexhe/ RTL Luxembourg

Malgré les difficultés, Xavier Bettel considère que le Luxembourg est sorti "renforcé" de ces crises et ce, grâce à ce qu'il considère comme "la recette magique" du pays. Il parle évidemment du mécanisme de la tripartite.

"Ce n'est pas toujours facile mais ces neuf dernières années, on a toujours réussi à s'asseoir autour d'une table pour trouver des solutions", affirme le Premier ministre. C'est ce qui lui fait dire que la tripartite, "c'est quand même un peu la potion magique du Luxembourg". L'objectif étant de garantir la paix sociale

Dans ce contexte, le politicien n'hésite pas à évoquer les mouvements de protestation dans les pays voisins. "Regardez la Belgique, regardez la France, la grève la semaine dernière, regardez l'Allemagne, les grèves qu'il y a eu. Moi la dernière grève (au Luxembourg) je ne m'en rappelle même pas."

Pourtant certaines décisions n'ont pas toujours fait l'unanimité. On pense notamment au report de l'index qui avait fait sortir l'OGBL de ses gonds. Près de 2.500 manifestants avaient d'ailleurs investi les rues de la capitale luxembourgeoise pour protester contre cette mesure. Un épisode que le Premier ministre n'a pas oublié. "Je dois avoir le courage de prendre des décisions, même si parfois elles sont impopulaires", réagit-il.

Cependant, il considère qu'au vu des circonstances, le gouvernement a pris "les bonnes décisions". Il rappelle que le taux d'inflation du Luxembourg est inférieur à celui de nombreux pays européens et que le taux de chômage et la dette publique n'ont pas explosé malgré les crises à répétition.

Mais cette législature turbulente n'a manifestement pas eu raison de la motivation du politicien qui se dit prêt à rempiler, si les électeurs et son parti veulent de lui. "J'ai l'énergie, j'ai la passion et l'envie de le faire mais mon parti ne me l'a pas encore proposé. Ce sera leur choix, ils devront voir s'ils sont prêts à me relancer dans la campagne", commente-t-il. 

À terme, ce sera bien évidemment aux électeurs de trancher. Une réalité bien présente dans l'esprit de Xavier Bettel. "Les électeurs sont tous mes patrons et j'ai un rendez-vous tous les cinq ans pour savoir si je continue. C'est un CDD", plaisante-t-il.