Pour soulager les automobilistes, l'A31bis passera peut-être par Florange. Mais le projet promet aussi son lot de désagréments pour la ville. Le maire Rémy Dick prend position.
Au cœur des débats autour de l'A31bis, il y a Florange. Située dans la vallée de la Fensch, la ville est directement concernée par le projet: trois des quatre tracés étudiés pour le contournement de Thionville passent directement sur la commune. Ou plutôt au-dessous.
Soit en tunnel profond, par les tracés F4 et F5, soit en tunnel de surface, qui est une deuxième possibilité pour F5. Cette variante représente probablement la plus grande menace pour Florange: pour réaliser un "tunnel de surface", on n'utilise pas de tunnelier. Il s'agit de creuser depuis la surface pour réaliser le tunnel puis reboucher au-dessus. Ce qui implique de réaliser 35 expropriations, car les terrains utilisés deviendraient non-constructibles ensuite.

Les tracés de l'A31bis en concertation. Trois d'entre eux concernent directement Florange (en vert et en jaune). / © Dreal
Inacceptable pour les habitants, inquiets d'être chassés de chez eux ou de subir les nuisances d'une autoroute et ses milliers de véhicules. Et inacceptable pour le maire de la ville. "Faire ce tracé F5, c'est sacrifier la ville de Florange. On sacrifie l'urbanisme de la ville, au profit de l'État, pour réaliser un tracé moins cher." Le tracé F5 en tunnel de surface est effectivement moins coûteux pour le concessionnaire privé, qui devrait construire la variante, mais aussi moins cher pour les automobilistes: 5,60€ par jour pour un aller-retour jusqu'au Luxembourg. Contre jusqu'à 8€, voire 8,80€ par jour, pour les tunnels profonds F4 et F5.
Ces deux derniers, dotés d'un péage plus chers, ont en revanche l'avantage de limiter les expropriations à des zones industrielles, des jardins ouvriers... "J'aurais tendance à dire, comme d'autres, que le tunnel profond sur F5 nous permettrait de mieux aménager les friches industrielles de la cokerie. Ce qui est quand même l'enjeu des dix prochaines années. Et donc j'aurais tendance à penser que le F5 "tunnel profond" est une réponse qui est raisonnable pour éviter les nuisances et les inquiétudes des populations tout en préservant l'urbanisme de Florange."

Rémy Dick, maire de Florange. / © RTL
Sur la question du péage, Rémy Dick regrette que le débat n'ait pas remis en cause la longueur du tronçon rendu payant. "Pour être efficace et pour avoir un sens, le péage devrait se faire depuis Metz ou Richemont. Je préfère un péage à 50 centimes, installé depuis Metz ou Richemont, qui devrait concerner tous les frontaliers, qui empruntent l'A31 comme l'A30. Si on parlait d'un péage sur davantage de véhicules, on aurait plutôt un péage à un euro."
S'il ne s'inquiète pas trop pour les frontaliers, c'est qu'il s'attend à ce que les employeurs luxembourgeois finissent par payer. "C'est le jeu de l'offre et de la demande. Il y a une telle tension sur le marché du travail au Luxembourg que les salariés sauront demander la compensation à leur employeur." En revanche, pour les automobilistes occasionnels, le péage prévu actuellement sera "pris de plein fouet" regrette-t-il.
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Quoiqu'il en soit, le projet d'A31bis est déjà très en retard. Et les variantes à l'étude prévoient toutes une mise en service dans plusieurs années. Passer par la cokerie avec une des deux variantes F5 implique de repousser la mise en service de l'A31bis à 2035 voire 2038, car le sol est certainement très pollué. Et nécessitera la destruction d'une partie de la forêt. Ce n'est pas le cas de la variante F4, livrable vers 2030 selon la Dreal.
C'est justement l'horizon 2030 qui inquiète les services de l'État: leurs prévisions de trafic laissent entendre des galères quotidiennes sur la partie nord de l'A31, mais aussi en traversée de Thionville, dont la saturation est proche. Pour les frontaliers, plus on attend, plus le quotidien sera difficile. Mais le maire préfère temporiser: "Je préfère un bon compromis qui prend du temps mais qui ne crée plus de débat. Florange attend cette problématique routière et autoroutière depuis 60 ans, on n'est pas à trois ans après. On est sur des sujets de long terme."
En l'état, les quatre variantes du projet de contournement de Thionville ont de toute façon le défaut de supprimer un échangeur au nord de Thionville. Ce qui limiterait l'accès immédiat pour une partie des riverains de la future A31bis. Reportant automatiquement une partie du trafic sur le réseau secondaire, le temps de rejoindre l'autoroute. "La ville de Florange, les Florangeois, sont les dindons de la farce. Tant qu'on n'a pas été rassurés sur cette question de l'échangeur, oui, la ville est totalement sacrifiée pour le bien-être de quelques frontaliers messins et pour le bien-être du flux national et international."
Malgré tout, le maire est formel: "Je crois au routier. On ne doit pas faire croire que la mobilité de demain c'est uniquement le train ou le bateau, alors que les gens n'utilisent que la voiture. Il faut regarder la réalité telle qu'elle est. Oui peut tendre à une amélioration (en matière de déplacements moins polluants, NDLR), mais il faut aussi traiter le routier." Notamment car les alternatives à l'A31bis sont quasi inexistantes à Florange, et limitées autour. "Le contournement peut avoir un sens dès lors qu'on relie VR52, A30 et A31. Parce qu'à Florange, il y a des gens qui n'en peuvent plus d'avoir des dizaines de milliers de véhicules sous leurs fenêtres."
Pour les Florangeois comme pour la municipalité, une dernière occasion de se faire entendre sera organisée jeudi 2 février, date de clôture de la concertation.
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